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La méthanisation en agriculture : contribution à la transition agroécologique ou opportunité énergétique ?

INRAE UR OPAALE, France a; ENSCR UMR ISCR, France b; INRAE UMR PEGASE, France c; Université Paris-Saclay, AgroParisTech, INRAE UMR ECOSYS, France d; Université Paris-Saclay, AgroParisTech, INRAE UMR Agronomie, France e; INRAE UR LBE, France f; ANSES Laboratory of Ploufragan-Plouzané-Niort, , France g; IRDL Univ. Bretagne Sud, France h; Institut Agro UMR SAS, France i; *Corresponding author, email: fabrice.beline@inrae.fr

La digestion anaérobie (DA) est un bioprocédé transformant les déchets organiques, les résidus organiques et les cultures en méthane (CH4) et en digestat. En France, environ 1300 unités AD sont actuellement en fonctionnement permettant la production d'énergie renouvelable avec une production annuelle de 2,7 TWh d'électricité et 4,4 TWh de biométhane. La plupart d'entre eux (>80%) sont mis en œuvre dans le secteur agricole. En plus de la production d'énergie, la DA est aussi souvent identifiée comme un levier de la transition agroécologique, notamment grâce à la substitution des engrais chimiques par le digestat et une meilleure gestion des nutriments. Cependant, l'insertion de la DA dans un système de production agricole entraîne des changements dans l'ensemble du système, ce qui soulève de nombreuses questions concernant à la fois ses impacts environnementaux potentiels et sa cohérence avec l'agroécologie. L'objectif de ce travail était donc de faire le point sur l'état actuel de la DA et ses impacts potentiels sur la transition agroécologique en France. Pour cela, un workshop réunissant des chercheurs et des acteurs des secteurs de la DA, de l'agronomie et de l'agroécologie a été organisé en octobre 2022 à Rennes afin d'analyser le développement de la DA à travers le prisme de l’agroécologique. Quinze intervenants ont présenté des résultats expérimentaux et/ou l'état de l'art sur les principales thématiques alliant agroécologie et DA et des tables rondes ont également été organisées pour recueillir les différents avis des acteurs.
D’après les résultats présentés, les émissions d'ammoniac et les fuites de méthane sont identifiées comme les risques majeurs concernant les impacts environnementaux du digestat mais les technologies permettent de les maîtriser, ou du moins, de les minimiser et de les rendre acceptables au regard des enjeux énergétiques. A l'échelle du système de production agricole, la DA conduit souvent, mais pas systématiquement, à une réduction de l'utilisation des engrais chimiques principalement due aux apports d'azote provenant des déchets issus de l'extérieur de l'exploitation. Cependant, les flux potentiels de N provenant des déchets organiques restent globalement faibles par rapport à l’azote minéral utilisé (<6%). Des modifications des pratiques culturales pour maximiser la production de biomasse ont également été observées avec notamment (i) un développement important des couverts intermédiaires à vocation énergétique (CIVE) et (ii) également, mais dans une moindre mesure, des modifications au niveau des cultures principales du fait de l'introduction de CIVE ou pour produire des cultures énergétiques. Ces cultures restent souvent produites de la même manière qu'avant l'introduction de la DA, c'est-à-dire souvent de manière intensive. Les changements systémiques induits par l’introduction de la DA ne sont pas encore pleinement caractérisés et des situations diverses et contrastées sont observées. Cependant, les premiers résultats indiquent que les performances agroécologiques sont, en moyenne, peu affectées par la DA, ce qui indique que jusqu'à présent l'effet de la DA sur la transition agroécologique est faible.
Pour contribuer à la fois à la transition agroécologique et à la production d'énergie, l'enjeu principal de la DA est de permettre une réduction des engrais minéraux en améliorant le recyclage des nutriments tout en évitant de nuire aux autres performances agroécologiques. Pour atteindre un niveau significatif de substitution des engrais minéraux azotés, l'utilisation des légumineuses dans les cultures de couverture ou fourragères devra être développée en trouvant des synergies avec la DA. Par ailleurs, des systèmes de DA flexibles ne nécessitant pas une productivité maximale et permettant de valoriser les cultures en plus des déchets lorsqu'elles sont disponibles en excédent tout en évitant leur intensification devraient être développés. Les politiques publiques devront être adaptées pour rendre possibles les systèmes de production agroécologiques avec la DA.
Références :
AD and agroecology workshop, Rennes, October 2022. https://www.gis-apivale.org/ACTUALITES2/Workshop-Methanisation-et-Agroecologie/Programme-Methanisation-Agroecologie

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