Kyulavski et al.

L’effet de l’apport couplé de résidus de coupe de canne à sucre et de PRO, sur la dynamique de décomposition du paillis et les émissions de gaz à effet de serre

Kyulavski V, Recous S, Garnier P, Paillat JM, Thuriès L

L’effet de l’apport couplé de résidus de coupe de canne à sucre et de PRO, sur la dynamique de décomposition du paillis et les émissions de gaz à effet de serre

Kyulavski V1,4,5, Recous S3, Garnier P4, Paillat JM2, Thuriès L1

  • 1 CIRAD, UPR Recyclage et Risque, Saint-Denis La Réunion, France
  • 2 CIRAD, UPR Recyclage et Risque, Montpellier, France
  • 3 INRA-Université de Reims, UMR FARE, Reims, France
  • 4 INRA-AgroParisTech, UMR1402 EcoSys, F-78850 Thiverval-Grignon, France
  • 5 ADEME, Angers, France

Mots-clefs : Décomposition au champ, Gaz à effet de serre, Paillis de canne à sucre, Produits résiduaires organiques, Apports couplés, Matière organique

L’utilisation de produits résiduaires organiques (PRO) en substitution d’engrais minéraux est encouragée, afin de préserver la fertilité des sols, en valorisant des matières organiques, autrement considérées comme des déchets. La valorisation des PRO au champ contribue au bouclage des cycles biogéochimiques à une échelle souvent locale, selon une logique d’économie circulaire. Dans les régions tropicales, la canne à sucre est un bon candidat à la fertilisation par les PRO. Lors de la récolte de la canne à sucre, une partie de la biomasse est souvent laissée au sol, formant un paillis qui se décompose durant le cycle cultural et qui peut donc être associé aux PRO. L’impact en termes d’émissions de gaz à effet de serre (GES) des sols, à la fois recouvert d’un paillis et recevant des PRO, a été peu étudié dans la littérature.

Nous avons mesuré le taux de décomposition du paillis, les émissions de dioxyde de carbone (CO2) et d'oxyde nitreux (N2O) sur le site du SOERE PRO à la Réunion, après l’apport de lisier de porc (LP), de boues de station d’épuration (BA) et de l'urée (U). D’autre part, nous avons appliqué deux niveaux de paillis : 10 t MS ha-1, pour LP, BA et U ; et 5 t MS ha-1 (0.5) pour LP et U, formant ainsi 5 modalités : LP, BA, U, U0.5 et LP0.5.

Indépendamment, afin d’investiguer les éventuelles interactions entre les PRO et la paille lors d’un apport couplé, nous avons effectué des incubations en conditions contrôlées sur 180 jours. Nous avons mesuré le potentiel de minéralisation du C et du N pour les 3 matières organiques seules, paille (Pi), boue de station d’épuration (BAi) et lisier de porc (LPi), ou en mélange (P-BA et P-LP).

Au champ, la vitesse de décomposition de BA (0.13 t MS ha-1 j-1) était deux fois supérieure, entre la deuxième et la quatrième semaine après l’apport, comparé à celles de U (0,06 t MS ha-1 j-1) et de LP (0.05 t MS ha-1 j-1). Toutefois, au jour 120, la masse sèche restante n’était pas significativement différente entre les différentes modalités. En outre, la perte de C du paillis a été proportionnelle à la quantité initiale de paillis, dans la gamme testée (5 ou 10 t MS ha-1). Dans les 49 jours après fertilisation, les apports de lisier de porc ont généré le plus de GES, alors que l’apport de boues de stations d’épurations était caractérisé par les émissions les plus faibles. Les émissions de CO2 ont doublé lors de l’application de 10 t MS ha-1 de paillis et d’urée, mais cet effet de la quantité de paillis n’a pas été détecté pour les modalités avec du lisier de porc.

Les potentiels de minéralisation de C des mélanges étaient supérieurs aux potentiels de minéralisation de C des PRO seuls. Les cinétiques de minéralisation de C ont été caractérisées par une vitesse de minéralisation supérieure des PRO et des mélanges PRO-paille, comparé à la paille seule.

Les résultats obtenus au champ montrent l’impact de la forme physico-chimique des apports sur les émissions de GES, lors d’une application dans des systèmes couplées PRO-paille. Les synergies constatées dans ces systèmes couplés, lors des incubations en conditions contrôlées, sont le résultat de l’apport de N par les PRO, qui a permis une minéralisation du C plus rapide.

La substitution de l'urée par des sources organiques de N et la quantité de résidus de coupe laissés au sol lors de la culture de canne à sucre, peut affecter les émissions de GES et l'empreinte carbone de l’agroécosystème. Cette étude met en perspective le recyclage des déchets organiques à l'échelle locale et l’utilisation alternative de la biomasse, tel que le paillis de canne à sucre.