Mercier et al.

Mesure de l’impact d’apports répétés de composts urbains sur les émissions de protoxyde d’azote en champ cultivé

Mercier V, Hagberg J, Bammé A, Vachet E, Rampon J-N, Houot S

Résumé

L’agriculture contribue pour 13,5% aux émissions de gaz à effet de serre (GES). Les émissions de protoxyde d’azote (N2O) contribuent pour moitié à ces émissions de GES par l’agriculture et sont largement liées au fonctionnement biologique des sols (processus de nitrification et dénitrification). Par ailleurs, le contexte  réglementaire actuel (lois Grenelle, lois sur les déchets, loi de transition énergétique), est favorable au développement du recyclage des produits résiduaires organiques (PRO)  en agriculture.

Depuis 2010, un réseau de sites d’expérimentation au champ mis en place pour étudier les impacts d’apports répétés de PRO sur la qualité des agrosystèmes sur le long terme a été labellisé au niveau national (SOERE PRO pour système d’observation et d’expérimentation pour la recherche en environnement).

L’étude se déroule sur le site « QualiAgro », un des sites de ce réseau SOERE PRO. En décembre 2015 le dispositif s’est équipé un système de chambre automatisée pour le suivi des gaz à effet de serre (GES).  Ce système vise à comprendre les dynamiques d’émissions des GES (N2O et CO2) dont les potentiels impacts environnementaux pourraient contrebalancer les intérêts des apports de composts au sol.

Les résultats présentés portent sur les six premiers mois de mesure de ces émissions de GES dans 2 modalités : apport d’engrais organique ou de compost de boue DVB. Tout d'abord, grâce à l'analyse des flux cumulés de N2O, nous réalisons que les émissions sont plus importantes sur la modalité DVB avec 229gN/ha (111 kg eqCO2/ha) contre 149gN/ha (73 kg eqCO2/ha) pour la modalité témoin. Le suivi de paramètres physico-chimiques du sol réalisés en parallèle (pH, azote minéral, teneur en eau), montre que les facteurs favorisants les émissions les plus importants seraient la teneur en nitrates disponible pour  les microorganismes et le taux de remplissage en eau des pores du sol (WFPS). Ces deux éléments étant les principaux paramètres influant la dénitrification.

Un autre objectif de cette étude était de simuler les flux de N2O émis, l’évolution des stocks en l’azote minéral du sol et le WFPS à l’aide du modèle CERES-EGC.  Malgré des difficultés rencontrées à caler ce modèle très complexe, les émissions de protoxyde d'azote simulées sont plutôt bien représentées. Elles suivent la même dynamique que les flux relevés par les chambres de mesures. Toutefois, il y a une surestimation non négligeable du modèle quant aux émissions de fin décembre, début janvier. Les quantités d'azote minéral simulées suivent également la même tendance de surestimation. Enfin la quantité d'eau contenue dans les pores du sol (WFPS) n'est pas simulée correctement avec des valeurs pratiquement toujours inférieures à celles mesurées dans les deux modalités.

S’il est encore trop tôt pour répondre à la question « est-ce que les émissions de N2O  contrebalancent le stockage de carbone dans les sols? », l’augmentation des stocks de C dans le traitement DVB depuis le démarrage de l’essai (18 ans), soit  25 tC/ha, représente un stockage de  0.7 tC/ha sur une période de 6 mois (durée de suivi des émissions de GES) ou 1800kg eq CO2 reste supérieure aux 38 kg eq CO2/ha émis par les GES de décembre à fin juin.

Date de modification : 03 juillet 2023 | Date de création : 14 décembre 2016 | Rédaction : Mercier et al.